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Exonération d’ISF pour les loueurs en meublés professionnels : précisions sur l’appréciation de la prépondérance des revenus tirés de cette activité

Civil - Fiscalité des particuliers
04/01/2024
Pour apprécier si la condition de prépondérance des revenus tirés de l’activité de location de meublés par rapport aux autres revenus pris en compte est remplie, dans le cadre de la détermination de l’assiette de l’ISF, il convient de retenir, non les recettes brutes tirées de l’activité de location meublée professionnelle, mais le bénéfice industriel et commercial net annuel dégagé par cette activité, précise la Cour de cassation dans un arrêt du 20 décembre 2023.
Pour mémoire, l’article 885 R du CGI dans sa version applicable au litige prévoit que sont exonérés de l’ISF, en raison de leur caractère professionnel, les locaux d’habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés par des personnes louant directement ou indirectement ces locaux qui, inscrites au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueurs professionnels, réalisent plus de 23 000 euros de recettes annuelles et retirent de cette activité plus de 50 % des revenus à raison desquels le foyer fiscal auquel elles appartiennent est soumis à l’impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du CGI.

En l’espèce, l’administration fiscale a considéré que les immeubles d’habitation loués meublés par des contribuables ne constituaient pas des biens professionnels exonérés au sens des dispositions de l’article 885 R du CGI, en ce qu’ils avaient retiré de leur activité de location, pour les années 2015 à 2017, un bénéfice imposable nul ou un déficit qui ne pouvait représenter plus de 50 % des revenus professionnels de leur foyer fiscal. Elle leur a en conséquence notifié le 8 mars 2019, une proposition de rectification concernant la base de calcul de l’ISF dû au titre de ces années, portant intégration dans l’assiette imposable des immeubles d’habitation qu’ils louaient meublés. Par un courrier en date du 26 mai 2020, l’administration a rejeté la réclamation contentieuse formée par les contribuables.

Ces derniers, soutenant que la condition de prépondérance des revenus tirés de l’activité de location de meublés par rapport aux autres revenus de leur foyer fiscal, prévue à l’article 885 R du CGI, devait s’apprécier au regard des recettes brutes tirées de l’activité de location meublée professionnelle, et non du bénéfice net dégagé par cette activité ont, après le rejet de leur réclamation contentieuse par l’administration, assigné l’administration fiscale en annulation de la décision de rejet et en décharge des rappels d’imposition mis en recouvrement.

Le tribunal judiciaire a fait droit à la demande d’annulation de la décision de rejet susvisée et a prononcé la 
décharge de la totalité de l’imposition contestée formée par les contribuables. Par déclaration parvenue au greffe le 27 novembre 2020, l’administration fiscale a interjeté appel de ce jugement et a demandé à la cour de confirmer la décision de rejet du 26 mai 2020.

La cour d’appel a rejeté la demande des contribuables en annulation de la décision de rejet de l’administration fiscale ainsi que leur demande de décharge de la totalité de l’imposition résultant de cette proposition de rectification.
Elle a en effet retenu que, s’il résulte de l’article 885 R du CGI que l’ensemble des recettes tirées de la location de meublés par les contribuables, doivent être prises en compte pour apprécier le seuil légal de 23 000 euros, 
« la notion de revenus doit être distinguée de celle de recettes en ce qu’elle correspond aux sommes effectivement perçues par les contribuables, lesquels ne peuvent valablement invoquer des revenus équivalents au chiffre d’affaires des locations de meublés ». Elle relève par ailleurs qu’il résulte des déclarations fiscales des contribuables que leur activité de location meublée professionnelle n’a donné lieu à aucun revenu au titre des années 2015 et 2017 et à un déficit au titre de l’année 2016. Les contribuables se pourvoient en cassation.

Dans un arrêt du 20 décembre 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation précise que pour apprécier si la condition de prépondérance des revenus tirés de l’activité de location de meublés par rapport aux autres revenus pris en compte est remplie, « il convient de retenir, non les recettes brutes tirées de l’activité de location meublée professionnelle, mais le bénéfice industriel et commercial net annuel dégagé par cette activité, afin de permettre la comparaison avec l’ensemble des revenus professionnels du foyer fiscal, y compris le bénéfice tiré de la location ».

Par suite, l’activité de location meublée n’ayant généré aucun revenu au titre des années 2015 et 2017 et un 
déficit au titre de l’année 2016, c’est à bon droit que la cour d’appel a déduit que cette activité ne représentait pas plus de 50 % des revenus des contribuables.

Ainsi, ce seuil de 50 % qui conditionne l’exclusion de l’assiette de l’ISF des locaux d’habitation loués meublés par les contribuables n’étant pas atteint, ces derniers ne peuvent bénéficier de l’exonération prévue à 
l’article 885 R du CGI.

Le pourvoi est rejeté.
Source : Actualités du droit