Retour aux articles

Coups portés sur un joueur de football : la contestation de la sanction disciplinaire relève du juge administratif

Public - Droit public général
17/10/2019
Contrairement à une décision de 2010, le Conseil d’État estime que la contestation d’une sanction disciplinaire prononcée par une Fédération sportive relève du juge administratif. Il en profite également pour signifier que l’état de récidive doit expressément apparaître dans la sanction.
À la suite de coups portés sur un joueur et de falsification d’un document officiel, la Fédération calédonienne de football prononce une sanction disciplinaire à l’encontre d’un entraîneur sportif. Elle se fonde notamment pour cela sur l’état de récidive de l’entraîneur. Ce dernier est radié à vie de toutes fonctions officielles, interdit de stade pendant cinq ans et interdit de vestiaire des arbitres et de banc de touche à vie. La sanction est confirmée par la Commission de recours de la Fédération calédonienne de football.

L’entraîneur saisit la justice d’une demande en annulation de la sanction pour excès de pouvoir. Infirmant la décision rendue en première instance, les juges d’appel font droit à sa prétention. Ils estiment en effet que la décision de la Commission de recours se fonde sur des faits matériellement inexacts. La Fédération n’a en effet produit aucun élément de nature à établir qu'il aurait déjà fait l'objet d'une sanction définitive pour des faits similaires à ceux qui lui étaient reprochés et qu'aucune récidive ne pouvait en conséquence être caractérisée en l'espèce. La Fédération sportive forme alors un pourvoi en cassation devant le Conseil d’État.

Le Conseil d’État se prononce au préalable sur une question de compétence. Selon la juridiction, la sanction « qui porte sur l'accès de l'intéressé au service public géré par la fédération, et non sur le fonctionnement interne de la fédération, relève de l'exercice de prérogatives de puissance publiques conférées à cette fédération pour assurer sa mission de service public. Par suite, le litige relatif à cette sanction ressortit à la compétence de la juridiction administrative ».

Ainsi, de jurisprudence bien établit (CE, 23 mars 1983 n° 33803), l’existence de prérogatives de puissance publique induit la compétence du juge administratif.

Le 19 mars 2010, le Conseil d’État avait pourtant estimé à l’égard d’une association sportive que « l'exercice du pouvoir disciplinaire par une association à l'égard de ses membres est inhérent à l'organisation de cette association et ne traduit pas, par lui-même, l'exercice de prérogatives de puissance publique qui nécessairement auraient été conférées à cette association pour l'accomplissement d'une mission de service public ». La compétence du juge administratif n’avait ainsi pas été retenue (CE, 19 mars 2010, n° 318549). L’arrêt du 9 octobre 2019 s’éloigne donc de cette conception.

La Haute juridiction administrative devait ensuite déterminer si une sanction disciplinaire doit expressément mentionner l’état de récidive justifiant la dureté d’une sanction.

Or, pour les magistrats, en se fondant sur un tel motif, alors que la décision de la Commission « se borne à indiquer, pour justifier les sanctions infligées à l'intéressé, que celui-ci a déjà fait l'objet d'une procédure disciplinaire pour des faits similaires, sans faire référence à la notion de récidive, ni même aux dispositions du règlement disciplinaire fédéral relatives à cette notion, la cour s'est fondée sur une inexacte interprétation de la décision attaquée. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ».

L’arrêt d’appel est donc annulé et l’affaire renvoyée devant une cour administrative d'appel. 
Source : Actualités du droit